gestion forestière dans les forêts des zones tropicales produits forestiers constituent des éléments fondamentaux dans les modes de vie ou – comme c’est
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DOCUMENT N°2 DE L™UNION EUROPÉENNE SUR LA FORESTERIE TROPICALEPRINCIPES ET PRATIQUE DE COGESTION FORESTIÈRE : TÉMOIGNAGES D™AFRIQUE DE L™OUEST David BrownOverseas Development Institute LondresCommission européenneBruxelles1999Le présent document a été financé par la Commission des Communautés européennes mais ne représente pas nécessairement l™opinion de la Commission.© Overseas Development Institute 1999ISBN NO: 0 85003 472 8Traduction:Claude Karnif Mise en page:Cathy Waterhouse Imprimé par:Russell Press Ltd, Nottingham
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iiTABLES DES MATIERES Résuméiv1.Introduction 12.La diversité des intérêts 13.Les éléments constitutifs 33.1Les objectifs du mouvement3 3.2Les forêts en tant que ressource naturelle4 3.3La place variable des forêts dans les modes d™existence4 3.4Le modèle de gestion en collaboration4 4.Appliquer le modèle de gfc 54.1Les questions de volonté politique5 4.2L™engagement institutionnel6 4.3Les questions de tenure6 4.4Appliquer le modèle de Gestion Forestière Communautaire7 5.Les ambiguïtés du modèle 85.1Les autochtones et les autres communautés locales8 5.2Les rôles de l™Etat 85.3Le développement participatif9 5.4Les communautés géographiques et sociales9 6.Stratégies d™adaptation locale 106.1Recréer les systèmes traditionnels de gestion des ressources10 6.2Appliquer la loi pour exclure les usagers illégaux12 6.3Valider les accords de partage des ressources avec des méthodes participatives13 6.4Les limites de l™approche sectorielle13 7.Etude des problématiques liées à la promotion de la foresterie communautaire 137.1Introduction 137.2L™étude de cas du Ghana15 7.3L™étude de cas du Cameroun22 7.4Conclusion des deux études de cas30 8.Les questions posées 318.1Les grandes questions d™occupation des sols31 8.2L™intérêt d™une approche sectorielle31 8.3Les accords de partage des revenus32 8.4Les conflits entre les organisations locales et l™Etat32 8.5Accroître la capacité de la recherche sociologique32 8.6La place de l™information33 8.7Les ficommunautésfl et la notion de développement participatif33 9.Conclusion 33Bibliographie35
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iiiLISTE DES TABLEAUX Tableau 1: Caractéristiques principales des différents types de relation entre forêts5 et moyens d™existenceTableau 2: Principes conceptuels pour des organisations plus solides de RPC7 Tableau 3: Comparaison Ghana-Cameroun11 Tableau 4: Superficie des Réserves Forestières ghanéennes, région par région18 Tableau 5: Superficie des exploitations tenues par les femmes et les hommes(% des exploitants)20 Tableau 6: Origine des terres cultivées en 1994 Œ Femmes et Hommes(% des parcelles agricoles)21 Tableau 7: Allocation des contrats d™exploitation forestière Œ par nationalité, 1991-6(Cameroun)26LISTE DES ENCADRÉSEncadré 1:La logique derrière l™engagement de la communauté dans la gestion forestière2 Encadré 2:Statistiques élémentaires sur les forêts du Ghana15 Encadré 3:Statistiques élémentaires sur les forêts du Cameroun23 Encadré 4:Classification et exploitation des forêts selon la Loi de 199424 Encadré 5:L™exclusion des usagers non traditionnels des ressources Œ le cas de Bimbia-Bonadikombo28
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ivRÉSUMÉLe principe de cogestion Œ l™engagement aussi bien descommunautés locales que de l™Etat dans la gestion forestière Œ est devenu un élément majeur de la plupart des programmes internationaux de développement du secteur forestier dans les pays tropicaux et une caractéristique importante des politiques et pratiques forestières dans le monde. Les arguments en faveur de l™engagement des communautés sont nombreux et convaincants, depuis les aspects positifs de la participation locale (en termes de capacité indigène et de proximité des ressources), jusqu™aux aspects négatifs des autres solutions (l™inefficacité des systèmes actuels de gestion uniquement industrielle et le besoin d™améliorer la discipline dans ce secteur).Le principal objectif de l™aide au développement de laforesterie ces vingt dernières années a été de placer la participation fermement au centre de la gestion des forêts tropicales et cela fut fait dans une très large mesure. Toutefois, on se demande maintenant de plus en plus si cette méthode se justifie du point de vue de l™impact probable à la fois sur les conditions d™existence des plus démunis et sur la conservation des ressources forestières. Le présent document s™intéresse à certaines des difficultés que ce mouvement rencontre actuellement et cherche des pistes de travail pour améliorer l™efficacité des interventions d™aide au développement.Le principal centre d™intérêt porte sur les tentatives faitespour promouvoir la participation communautaire à la gestion forestière dans les forêts des zones tropicales humides de l™Afrique subsaharienne. Dans ces sociétés, il n™est pas rare de constater des déséquilibres significatifs de pouvoir entre les utilisateurs industriels et non industriels et des niveaux discutables de volonté politique dans les principaux organismes d™Etat. Ces deux éléments constituent des obstacles importants à une réelle participation communautaire. Dans ce contexte, il est aussi peut-être risqué de chercher à changer les systèmes de tenure foncière pour favoriser une gestion forestière durable, cela ne garantirait d™ailleurs pas un meilleur accès des pauvres à ces ressources. Une autre difficulté vient du fait que les préjugés fréquents dans le modèle classique de cogestion forestière sur les identités et les relations communautaires peuvent très bien ne pas convenir aux conditions qui persistent encore dans de nombreuses régions de haute futaie tropicale. Dans le monde moderne d™intégration globale, de monétisation des économies, de complexité sociale grandissante et d™augmentation des pressions exercées sur les ressources naturelles, ces régions sont souvent hautement instables au niveau social et la dynamique des populations ne favorise pas toujours la solidarité communautaire et l™action en commun.A partir d™études de cas réalisées dans des zones de hautefutaie au Ghana et au Cameroun, ce document passe en revue les ambiguïtés du modèle classique de cogestion forestière et les difficultés rencontrées dès que l™oncherche à appliquer ce modèle à des contextes nationauxspécifiques. Il prend en considération certaines des solutions proposées pour traiter ces problèmes d™adaptation locale. Ce dossier est particulièrement sceptique au sujet des tentatives faites pour recréer des systèmes de gestion traditionnelle des ressources. Elles supposent en effet l™existence de directions fitraditionnellesfl efficaces avec, à la base, une communion de vue chez les dirigeants et les dirigés. Dans ni l™une ni l™autre des études de cas, la situation ne correspondait à cette hypothèse. Au Ghana, les intérêts qui séparent les chefs traditionnels de leurs administrés sont peut-être au moins aussi importants que ceux qui les unissent. Dans de nombreuses régions du Cameroun, la notion même de véritable autorité traditionnelle est mise en doute. Différents niveaux d™hétérogénéité dans les deux contextes (avec une immigration croissante et un mélange des populations) gênent également l™union des forces communautaires autour de l™autorité traditionnelle, notamment lorsqu™il y a un groupe ethnique ou tribal dominant. Au Ghana, les populations rurales ont fait preuve de fluidité pendant des siècles et une communauté rurale typique se caractérise aujourd™hui par une grande variété de statuts sociaux, reflétant toute une hiérarchie en matière de contrôle et de propriété des ressources naturelles. La structure sociale de la ruralité camerounaise est plus variable bien que d™une complexité croissante.Lorsque les communautés manquent d™harmonie auniveau géographique et social, on peut avancer que le contrôle des ressources devrait être mis entre les mains des autorités territoriales plutôt que de le confier aux autorités ou communautés culturelles, socialement définies. Il y a des arguments en faveur de cette approche dans nos deux études de cas, bien qu™il y en ait aussi d™autres allant dans l™autre sens. Dans les zones de haute futaie, les autorités gouvernementales locales ont souvent la responsabilité de grandes superficies et d™importantes populations (ce qui diminue leur capacité à distribuer des incitations administratives à la conservation des forêts) et là où les systèmes électoraux lient fermement les représentants du gouvernement à la politique centrale (comme c™est le cas au Cameroun), il n™y a aucune certitude que les prises de décision puissent refléter l™intérêt local à long terme et, encore moins, contribuer à la conservation des ressources naturelles.Dans des contextes de ce genre, les projets d™aide audéveloppement risquent de rencontrer un certain nombre de difficultés. Les problèmes d™allocation des ressources auxquels ils sont confrontés ne peuvent probablement pas se résoudre au niveau strictement local et les types d™approches actuellement favorisées Œ par exemple, appliquer des méthodes rapides et participatives pour identifier les principales parties prenantes Œ risquent de passer à côté de la dimension historique des systèmes de gestion actuels et d™être incapables de prendre en compte les implications plus générales au niveau intersectoriel et sociétal. Si l™on ne peut que se féliciter de la tendance au développement des projets de foresterie communautaire,
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vles questions politiques qui se posent sont rarementspécifiques à ce secteur et le personnel de ces projets est souvent confronté à des problèmes qui ne relèvent pas de leur mandat.La principale conclusion du présent document est que lesdéfis fondamentaux confrontant le mouvement concernent des questions plus larges de gestion de l™utilisation des sols avec d™importantes composantes intersectorielles et qui ne peuvent pas être résolues uniquement au sein du secteur forestier. Les implications pour les interventions des donateurs sont diverses. Au point de vue des projets, les questions concernent l™équilibre entre les intérêts sur le terrain et les initiatives politiques ; la nature, fonction et programmation des activités pilotes ; et la nécessité, pour les institutions de tutelle, de relier expérience locale et politique nationale. Au point de vue des programmes, les questions concernent les mérites relatifs des approches sectorielles et intersectorielles, les limites de la délégation des pouvoirs du gouvernement, le rôle des organes de planification multisectorielle et de l™ensemble des parties prenantes, le rôle des approches basées sur les droits et la nature des processus d™apprentissage par-delà les frontières. Tout cela fait appel à une plus grande coordination entre gouvernements et donateurs (et au sein de la communauté des donateurs), et à l™union des différentes compétences et perspectives puisées dans une grande diversité de sciences naturelles et humaines.REMERCIEMENTSL™auteur tient à remercier les personnes suivantes de leur aide lors de la préparation du présent document : James Acworth, Kojo Amanor, Mike Arnold, Evelyne Beng, Philip Burnham, John Casey, Graham Chaplin, Elijah Yaw Danso, André Djeumo, Chimere Diaw, François Ekoko, Samuel Egbe, Bill Garber, Jane Gronow, Ousseynou Ndoye, Jean-Luc Roux, Barrie Sharpe, William Sunderlin et Fred Swartzendruber, ainsi que des collègues du Groupe chargé de la Politique forestière et de l™Environnement à l™ODI (chercheurs : Michael Richards, Kate Schreckenberg, Gill Shepherd et administrateur : Cathy Waterhouse, pour la présentation et la mise en page).Certaines parties de ce rapport ont été présentées lorsd™une invitation au Cours international et au Séminaire exécutif sur la Gestion locale des Arbres et des Forêts au service d™une Utilisation durable des Sols qui se sont tenus conjointement au Centre International d™Agriculture de Wageningen, aux Pays-Bas, en septembre 1998. L™auteur remercie les contributions faites par les participants à cette rencontre pour développer l™argumentation.
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viLISTE DES ACRONYMESCUBContrat d™utilisation du Bois (Ghana) DFNPDomaine forestier non permanent (Cameroun) DFPDomaine forestier permanent (Cameroun) FABFranco à bord GFCGestion forestière en collaboration (ou communautaire) GFPGestion forestière participative GICGroupe d™initiative commune (Cameroun) GIEGroupe d™intérêt économique (Cameroun) MINEFMinistère de l™environnement et des forêts, République du Cameroun OFOffice des forêts, ministère des terres et des forêts, Ghana ONGOrganisation non gouvernementale PFNLProduits forestiers non ligneux RPCRessource en propriété commune SGFService ghanéen des forêts (l™organe semi-indépendant du secteur public devant être créé à partir de l™OF)UFAUnité forestière d™aménagement (Cameroun) UFCUnité de foresterie communautaire, Ministère de l™environnement et des forêts, République du CamerounWWFFonds mondial pour la nature (ONG) ZHFZone de haute futaie ZPZone protégée
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2Encadré 1: La logique derrière l™engagement de la communauté dans la gestion forestière1.Proximité : les populations locales sont les gardiennes immédiates de la forêt. Elles sont les parties prenantes les plusproches de la forêt et dépendent d™elle de bien des façons. Elles sont donc les mieux placées pour en prendre soin efficacement.2.Impact : leurs activités de subsistance ont de même un effet très direct sur la condition de la forêt ; ainsi, leur engagement dans sa gestion est tout à fait pragmatique.3.Equité : il peut y avoir des considérations importantes d™équité et de justice sociale dans l™exploitation des forêts. Lagestion forestière à caractère communautaire devrait permettre d™accroître la quantité de ressources revenant aux populations rurales, avec des conséquences importantes pour la réduction de la pauvreté et la distribution des revenus.4.Moyens d™existence : les besoins et intérêts locaux ne devraient pas non plus être dédaignés, notamment lorsque les produits forestiers constituent des éléments fondamentaux dans les modes de vie ou Œ comme c™est souvent le cas pour les produits forestiers non ligneux (PFNL) Œ d™importants filets de sécurité. On a constaté que le développement du secteur forestier pour un usage industriel unique détériore les moyens d™existence, détourne les avantages qu™en tiraient les pauvres et désavantage des catégories importantes d™usagers (notamment les femmes). L™engagement de la communauté dans la gestion forestière, lorsque les forêts jouent un rôle important dans les modes de vie rurale, devrait conduire à des modifications substantielles de la manière dont les forêts sont gérées, assurant du même coup la préservation et/ou la diversification de leurs multiples bénéfices. Le volet de protection sociale doit donc prendre une place importante dans la gestion forestière communautaire.5.Capacité : ces dernières années, la capacité de gestion des habitants des forêts a été fortement préconisée dans la littératuredes sciences humaines tandis que celle des gouvernements était de plus en plus remise en question. Les rôles des communautés dans la gestion forestière sont maintenant bien documentés et, au regard des récentes expériences d™engagement communautaire, il semble bien qu™elles amélioreraient grandement la qualité et l™état de la forêt, dans des proportions supérieures à celles que les gouvernements sont capables d™obtenir par eux-mêmes (voir, par exemple, Soussan et al, 1998).6.Biodiversité : du fait de leurs intérêts dans la gestion à usage multiple, les utilisateurs locaux ont toutes les chances demieux conserver la biodiversité que les groupes industriels n™ayant qu™un seul intérêt ou ceux qui les soutiennent. En dépit de nombreuses affirmations contraires, la biodiversité pourrait très bien s™enrichir, et non pas s™appauvrir, du fait des activités des habitants des forêts.7.Rentabilité : pour des considérations d™efficacité, on peut faire rarement autrement que d™associer les communautés à la gestion forestière. En effet, très souvent dans le monde en développement, il y a très peu de possibilités de gérer efficacement les ressources forestières uniquement avec le secteur public. Même lorsque celui-ci peut le faire, le prix de revient d™une gestion exclusivement et directement assurée par l™Etat peut s™avérer trop élevé et une gestion locale peut être un bon moyen d™en diminuer les coûts.8.Adaptation : la reconnaissance croissante de la diversité des cultures et des moyens d™existence encourage une approchecentrée sur la participation locale et l™adaptation contextuelle. Presque par définition, une gestion flexible et adaptable ne peut pas s™appliquer depuis le centre, les intérêts et les pressions locales doivent donc pouvoir s™exercer.9.Administration gouvernementale : associer les communautés et institutions communautaires à la gestion forestière (un secteur souffrant souvent d™un manque évident de fibonne administrationfl) pourrait contribuer à introduire un peu de discipline dans la gestion de ce secteur et permettre d™équilibrer et de surveiller des services publics souvent livrés à eux- mêmes. Plusieurs auteurs ont souligné le rôle important que les organisations de la société civile peuvent avoir pour augmenter fil™expression populairefl et agir comme fiporte-parolesfl (voir, par exemple, Paul 1991). Le secteur forestier, du fait qu™il déborde sur de nombreux aspects de la vie locale, peut constituer une tribune importante où cette expression populaire pourrait faire entendre sa voix.10.Philosophie du développement : la GFC devrait bien d™intégrer aux stratégies plus générales d™aide au développement poursuivies par la communauté internationale. En effets, celles-ci donnent une grande priorité aux principes de participation locale, de décentralisation et de fisubsidiaritéfl (le principe selon lequel les décisions devraient être prises le plus près possible des citoyens concernés), ainsi que la promotion de la société civile, des principes tous potentiellement possibles grâce à la GFC.
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3De toute évidence, on parle de deux situations biendifférentes lorsque l™on compare, disons, des ressources forestières de montagne, ayant peu de valeur commerciale mais précieuses pour l™existence des populations dans un district isolé de l™Himalaya, hors de porté réelle des organismes d™Etat, à celles des forêts tropicales humides d™Afrique centrale où les intérêts de l™une des parties prenantes Œ l™industrie du bois Œ surpassent de beaucoup ceux de toutes les autres. Dans ce dernier cas, la solidité de l™alliance entre l™industrie et l™élite induit un déséquilibre fondamental dans la gestion des ressources, de sorte que les autorités centrales voient très peu de raisons d™en partager les bénéfices avec les communautés locales. De même, on ne peut comparer le pouvoir d™un office forestier riche, fort et déterminé à préserver sa propre puissance qui est considérable (ex : l™Office Indien des Forêts), avec une agence de vulgarisation fragile et démunie de fonds dans, disons, un pays du Sahel, et qui n™a d™autre choix que de faire des compromis et de partager le futur poids du pouvoir avec des groupes d™usagers primaires, et qui peut même souhaiter la possibilité d™un soutien communautaire. Voire au sein d™une même société, les relations entre l™Etat, les populations rurales et la forêt ne sont pas toujours constantes et l™intérêt de deux groupes de partenaires peut varier au fil du temps en fonction des nouvelles options économiques.Il est aussi probable qu™il y a de fortes variations dans lamanière dont les problèmes de participation publique à la certification des forêts sont perçus, en fonction du contexte en question. La participation, en tant qu™outil de préservation de la biodiversité dans une zone à faible densité démographique et sans grand potentiel touristique aura probablement une signification tout à fait différente de celle intervenant dans une région densément peuplée et à fort potentiel touristique. On citera plusieurs aspects de la première hypothèse qui la rendent particulièrement difficile. La question de la sélection du site en est une. Les zones à faible densité sont souvent rebelles au développement participatif car le prix de revient de la gestion des ressources risque fort de dépasser largement les bénéfices attendus en termes d™amélioration des conditions et de pérennité et, surtout, des avantages locaux à court terme. De même, il y a le fait que l™économie locale dans de telles régions a tendance à dépendre non pas de la préservation des habitats naturels mais de leur conversion. Il est intéressant de noter que des niveaux élevés de biodiversité et de conversion des habitats naturels ont tendance à apparaître dans les mêmes environnements (Blaikie et Jeanrenaud, 1996). Cela remet en cause les modèles conventionnels de conservation participative de la biodiversité, ce qui rend difficile pour les donateurs (notamment les organisations écologiques) de réconcilier leur engagement déclaré envers la primauté des intérêts communautaires et leurs principes en faveur de la conservation. Trop souvent, les approches des donateurs à l™égard de la participation communautaire à la gestion des zones protégées ont souffert de ne pas avoir reconnu les différences tout à fait significatives qui existent là où les forêts sont bien intégrées aux modes de vie rurale et où laconservation de la biodiversité signifie avant tout labiodiversité des ressources, alors que la perception occidentale du concept de Zone Protégée (ZP) signifie très souvent de simplement limiter son exploitation industrielle au profit d™activités de loisirs et de conservation. Changer l™objectif qui consiste à tenter de détourner les populations de leurs modes de vie actuels (en le justifiant par l™affirmation souvent hautement contestable qu™elles sont les principales responsables de la dégradation des forêts) pour les inciter à une participation constructive à l™économie existante risque d™être la première étape importante de ce processus pour de nombreux pays en développement (Brown, 1998).Dans le même temps, il y a probablement de grandesdifférences dans la manière dont les diverses parties prenantes perçoivent les objectifs de la cogestion, en particulier s™agissant de la priorité à accorder aux questions d™efficacité et d™équité. Il n™y a aucun doute que de nombreux gouvernements encouragés par des donateurs à adopter la cogestion ont des objectifs plus limités à ce sujet que les agences donatrices elles-mêmes et que les ONG partenaires voient les choses d™une manière très différente. Il convient de poser d™importantes questions de propriété et de souveraineté avant de décider des intérêts à privilégier. L™atmosphère de gestion en crise qui prévaut dans une grande partie du débat international sur les forêts tropicales et l™environnement a eu tendance à restreindre, au lieu d™élargir, les possibilités alternatives et a, trop souvent, servi à justifier des mouvements rétrogrades qui s™opposent aux solutions locales sous prétexte de servir l™intérêt général (Roe, 1997 ; Fairhead et Leach, 1998). Si ces initiatives de cogestion parviennent à créer un ensemble de précédents juridiques pour aller à l™encontre de ces perceptions, leur influence sur le mouvement en faveur de l™environnement pourrait être profonde.3.LES ÉLÉMENTS CONSTITUTIFS 3.1Les objectifs du mouvement On peut considérer la GFC/GFP comme une série dechangements politiques visant à accroître à la fois l™efficacité et l™équité de la gestion forestière, à travers diverses mesures juridiques et organisationnelles. Cela passe généralement par une décentralisation de la gestion forestière, la promotion de réformes institutionnelles appropriées, une augmentation des ressources allouées aux populations dépendantes des forêts et la création de nouveaux partenariats à la suite de modifications de propriété et d™accès. Ces derniers sont destinés à donner une série d™avantages à des populations locales jusqu™ici plus ou moins privées de leurs droits, à savoir, une augmentation de leur sécurité foncière et de leurs revenus, et des droits de participation aux décisions concernant l™occupation des terres. La GFC n™est pas le seul moyen à la disposition des gouvernements et de leurs partenaires
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4internationaux pour améliorer la qualité de la conservationdes forêts, leur gestion et l™équité en ce domaine 2, maisc™est un élément important et souvent au centre des réformes institutionnelles.La proportion GFC-GFP varie selon les programmes et lesquestions relatives à la meilleure combinaison en terme d™efficacité et de reproduction d™une culture à l™autre sont importantes et suscitent encore un débat considérable (ODA, 1996 ; DFID, 1999).3.2Les forêts en tant que ressource naturelleBien que sujettes à de considérables variations locales, les ressources des forêts tropicales humides ont toutes les chances d™être de grande valeur, d™avoir des utilités multiples, de couvrir de grandes superficies, d™exiger de longs délais d™exploitation, d™être très vulnérables aux influences extra-sectorielles et d™avoir des potentiels de profits incertains mais substantiels. Leur gestion prête le flanc à toute une série de difficultés commerciales et politiques. Parmi les difficultés commerciales, on notera que de nombreux produits forestiers n™entrent pas sur le marché, ne sont pas monnayés et restent difficiles à évaluer par un quelconque numéraire commun ; celacomprend à la fois les produits locaux non commercialisés et les avoirs publics non compensés (services environnementaux) ayant une valeur nationale et internationale. Parmi les difficultés politiques, on retiendra que ces ressources sont souvent très sous- évaluées par les gouvernements car leur valeur affichée ne prend pas en compte leurs bénéfices à long terme et le coût de leur substitution. La capacité de les gérer est diminuée par l™insécurité foncière de ceux qui vivent à proximité de la forêt et par le fait que, à la différence des produits agricoles, le petit producteur n™acquiert pas de droits significatifs au cours du processus de production ; des délais d™exploitation plus longs et moins contraignants pourraient jouer là un rôle critique (Gregerson et al, 1993).Dans l™ensemble, les forêts tropicales constituent unenvironnement complexe pour une gestion collective. Plus le coefficient de ces variables et plus la fréquence des échecs politiques et commerciaux sont élevés et plus difficile sera probablement leur cogestion par les communautés locales. Les forêts humides se caractérisent par une tendance à avoir des densités démographiques plutôt plus faibles que les aires adjacentes de forêts sèches, ce qui signifie aussi que leurs ressources risquent relativement moins de subir de grandes pressions. Làencore, cela peut diminuer l™intérêt porté par l™Etat à uneapproche participative de ce genre d™environnement.3.3La place variable des forêts dans les modes d™existencePour comprendre le potentiel de la GFC, il convient de prendre en compte aussi les relations variables qui existent entre les habitants des forêts et leur habitat, relations qui reflètent elles-mêmes les différences de densité démographique, le type et l™étendue du couvert forestier, la pénétration du marché et la différentiation sociale. Apprécier la nature variée de la relation humaine avec cette ressource constitue un élément fondamental d™une GFC adaptée et, à cet égard, la classification en 4 points de Byron et Arnold est une référence instructive (tableau 1). Elle indique les variables essentielles qu™il faut prendre en compte pour évaluer la position des principales parties prenantes et les modes d™existence dans chaque régime, ainsi que les options politiques permettant d™améliorer leur position. Ce qui apparaît clairement de cette classification c™est que le potentiel d™action collective n™est pas également réparti et que, du point de vue des seules questions de ressources naturelles, certains types d™exploitation forestière sont intrinsèquement plus prédisposés à la cogestion que d™autres. Dans la typologie de Byron et Arnold, les classes 1 et 4 semblent être relativement bien adaptées à des régimes de cogestion.3.4Le modèle de gestion en collaborationLe modèle ficlassiquefl (idéal-typique) de GFC repose sur une certaine notion de ficommunauté dépendante d™une forêtfl qui est aussi (plus ou moins) une communauté physique. On estime aussi qu™il doit y avoir (là encore plus ou moins) un certain équilibre entre la proximité de la ressource, l™importance de la dépendance à son égard et la légitimité fondamentale de la revendication de propriété ou du moins d™accès. Comme pour tous les concepts théoriques, il s™agit là d™une simplification et si tous ces rapports ne sont pas exactement de cette nature, on risque d™avoir des difficultés particulières à appliquer le modèle.Une grande partie de la réflexion qui suit porte sur unexamen plus précis de ce modèle, l™exploration de sa validité tout en reconnaissant ses limites en tant que représentation de la réalité pleine et entière de la GFC. L™idée développée ici est que les difficultés rencontrées actuellement par de nombreux projets de GFC sont liées aux très grands défis qu™il y a à rendre opérationnel ce modèle dans le monde d™aujourd™hui, préoccupé par l™intégration mondiale, la monétisation des économies, la complexité sociale croissante et toujours plus de pression sur les ressources naturelles.2 D™autres moyens comprennent diverses combinaisons (par exemple) : gestion industrielle améliorée de la forêt, réduction de l™impact des méthodes d™abattage et autres changements technologiques dans l™industrie forestière, incitations à la transformation locale du bois, incitations commerciales telles que la certification des forêts et les labels verts, mesures pour rectifier les incitations politiques inappropriées, intensification de l™agriculture et autres formes de renforcement institutionnel ou de réforme juridique au niveau national.
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5Relations à la forêt Profil type des ressources Les parties prenantes Les moyens d™existence potentiels Implications politiques 1.Forêts gérées par les utilisateurs en propriété commune Principalement des populations vivant dans un environnement forestier et pratiquant la chasse, la cueillette et l™agriculture itinérante Des communautés homogènes avec des attitudes similaires à l™égard de l™utilisation des ressources Ces forêts sont au centre du système de subsistance. Historiquement stable mais souvent difficile à maintenir face à des pressions extérieures (ex : abattage, salaires et opportunités commerciales) Le maintien des systèmes collectifs de gestion et de contrôle forestiers nécessite la reconnaissance et la protection par le gouvernement des droits des groupes locaux d™usagers (ex : contre l™industrie du bois et l™empiétement d™autres populations); et d™éviter certaines mesures dans d™autres secteurs, telles qu™une politique de peuplement qui les fragiliserait 2.Forêts utilisées par des parties prenantes multiples ayant différents intérêts Une association d™agriculture, d™objectifs de production et de conservation pour les forêts et avec des exploitants industriels, l™Etat et des utilisateurs locaux Des groupes d™usagers multiples risquant d™avoir des revendications contradictoires ou concurrentes sur les forêts – à la fois entre les usagers locaux et les autres et entre les différentes catégories d™usagers locaux. Manque d™attitudes similaires à l™égard de l™utilisation des ressources et conflits potentiels Ces forêts sont toujours importantes dans les stratégies de subsistance pour les pauvres dans des conditions d™économie stagnante. Avec leur croissance, le pauvre risque de perdre l™accès à la ressource car elle passe sous le contrôle d™intervenants plus riches et plus puissants, mieux à même d™exploiter les possibilités commerciales ou de privatiser les terres boisées et en faire une utilisation non forestière Fragmentées, intérieurement différenciées, les communautés risquent, si elles ne sont pas aidées, de ne pas avoir la capacité de faire face à des concurrents. D™autres efforts sont nécessaires pour développer et soutenir des approches de gestion pluralistes et adaptées. Les incitations à la participation locale doivent suivre l™évolution du rôle des produits forestiers. Les obstacles politiques peuvent comprendre des changements de tenure qui menacent les droits existants et des restrictions à la récolte privée et à la commercialisation des produits forestiers 3.Produits forestiers venant principalement de sources agroforestières Ressources forestières en déclin, modification de la demande et facteur de disponibilité et d™allocation sur les terres agricoles, favorise les récoltes arboricoles Uniquement disponibles à ceux ayant accès aux terres qu™ils peuvent cultiver, l™arboriculture n™est pas toujours possible pour les métayers et autres agriculteurs ayant des contraintes de tenure Ils donnent aux pauvres agriculteurs un moyen peu cher d™améliorer la productivité du site, de le diversifier pour réduire les risques et de satisfaire les besoins familiaux sans trop de main-d™oeuvre. L™arboriculture commerciale a plus de chances de convenir à ceux qui n™en dépendent pas pour leur nourriture et/ou qui ont d™autres sources de revenus Les conditions de tenure qui limitent la culture des arbres ont peut-être besoin d™être clarifiées/modifiées. La politique devrait s™attacher plus à harmoniser l™offre et la demande. Les obstacles empêchant les agriculteurs d‚accéder aux marchés et faisant baisser les prix des produits de leurs arbres/forêts doivent être pris en compte (ex : les systèmes commerciaux fonctionnant mal et la concurrence des produits subventionnés provenant des forêts et plantations de l™Etat) 4.Les activités liées aux produits forestiers sont un source importante d™emplois et de revenus Facilité d™accès à la ressource, seuils d™entrée peu élevés et demande rurale de produits forestiers peuvent faire de ces activités une source majeure de revenus non agricoles en milieu rural Activités ouvertes aussi bien à ceux qui n™ont pas de terres qu™aux autres et aux femmes autant qu™aux hommes Souvent un élément important des stratégies de subsistance pour ceux qui ont peu de possibilités d™avoir d™autres revenus. Toutefois, les profits sont souvent modestes et les futurs marchés en déclin ou plus compétitifs. Les activités culturales plus rémunératrices nécessitent souvent un savoir-faire et des moyens uniquement à la disposition des plus riches et des plus compétents Eliminer/améliorer les réglementations partiales et autres qui favorisent les concurrents industriels et étatiques. Privilégier l™amélioration de la productivité des producteurs et commerçants ruraux et les opportunités de créer des activités et des marchés durables. Différents groupes ciblés ont différents besoins (crédit, formation, etc.). Il conviendrait peut-être d™aider les gens dans les secteurs en déclin à se recycler dans des activités plus rentables Source: adaptée de la base d™Arnold (1999) d™après Byron et Arnold (1997)Tableau 1 : Caractéristiques principales des différents types de relation entre forêts et moyens d™existence4.APPLIQUER LE MODÈLE DE GFC L™attitude prévalant actuellement chez les donateurs estgénéralement ce que Hobley a décrit comme le passage d™une phase initiale faisant la promotion de la GFC à une phase de consolidation, plus sceptique, plus analytique (1996 : 254-5). L™enthousiasme initial suscité par la gestion forestière en collaboration fait place à l™envie progressive de tester ses limites. Le modèle classique estperçu comme de plus en plus difficile à appliquer et l™onrecherche maintenant des compromis qui n™étaient pas prévus au départ et qui peuvent remettre en cause les objectifs recherchés.4.1Les questions de volonté politique Ces difficultés reflètent en partie les inquiétudes sur le niveau de volonté politique nationale, notamment lorsque
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